Le droit des baux commerciaux a été profondément modifié par la loi Pinel. Maître ROLLAND de RENGERVE, Avocat au Barreau de Toulon, propose un tour d’horizon des principales modifications apportées par le législateur.
Le projet de loi Pinel relatif à l’artisanat, au commerce et aux TPE répond à un problème juridique essentiel qui est celui de savoir s’il est préférable pour un preneur de souscrire un bail commercial classique, de 3-6-9 ans, avec faculté de résiliation triennale, ou accepter un bail ferme de 6 ans, en contrepartie d’une éventuelle franchise de loyer à négocier avec le bailleur. Préalablement, il convient de rappeler que le statut des baux commerciaux est régi par le décret n°53-960 du 30 septembre 1953 dont les dispositions sont codifiées dans le Code de commerce, aux articles L 145-1 et suivants. L’essence même de ces dispositions, qui pour la plupart sont d’ordre public, est la protection du commerçant locataire.
Ainsi, pour assurer l’effectivité de cet objectif de protection, le droit a consacré la faculté du locataire de donner congé à l’expiration de chaque période triennale, sous réserve que la dénonciation soit effectuée par exploit d’huissier en respectant un préavis de 6 mois (c.com, art. L145-4 et L 145-9). Il s’agit là d’une condition essentielle à la signature du bail par le preneur et toutes clauses ou arrangements qui ont pour effet de faire échec aux dispositions de l’article L 145-4 seront alors nuls de droit.
Toutefois, conformément au droit des contrats, sur la base de l’article 1134 du code civil qui instaure le principe élémentaire de la liberté contractuelle, les contractants peuvent prévoir dans le contrat de bail que le preneur renonce à sa faculté de résiliation triennale du bail, sous réserve d’obtenir du bailleur soit un avantage en matière de loyer soit la prise en charge d’aménagements ou de travaux particuliers, en fonction des besoins du locataire.
A contrario, le projet de loi Pinel milite pour la suppression de la clause de renonciation appartenant au preneur, s’agissant de sa faculté de résilier le bail tous les trois ans (article 1A de la loi nouvelle). L’idée est d’assouplir la vue commerciale et de ne pas enfermer le preneur dans un bail qui finirait par lui être préjudiciable. A titre d’exemple, il s’agira notamment de la situation du preneur bloqué sur 6 ans fermes alors que l’exploitation du fonds s’avère déficitaire.
Pour se faire, le preneur qui souhaite partir en cours de période triennale devra négocier avec son bailleur qui, dans tous les cas, pourra l’assigner devant le Tribunal de grande instance compétent pour solliciter l’exécution forcée du contrat de bail (paiement des loyers restants dus et le cas échéant, les pénalités prévues dans le bail). Toutefois, dans une hypothèse plus favorable, le bailleur pourra accepter de laisser son locataire partir avant le terme de la période triennale ou ferme de son bail en échange du paiement des loyers dus au titre de l’année en cours ou de 2 années et ce sera à la juridiction saisie de déterminer le montant des loyers à verser, avec tous les aléas que la procédure comporte.
A lire : Une modification substantielle du statut des baux commerciaux