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6 choses à savoir sur le contrôle fiscal

Date de publication : 18.10.22

contentieux . droit fiscal

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Morgiane Quartana

Le contrôle fiscal est une procédure engagée par l’administration fiscale pour contrôler les déclarations d’impôt déposées par les contribuables.

C’est un moment important pour toute entreprise, qui devra sans doute y faire face au moins une fois au cours de sa vie sociale.
En quoi consiste le contrôle fiscal ? Comment se déroule-t-il ? Quels sont les indices qui peuvent déclencher un contrôle fiscal ? Comment y faire face en toute sérénité ? Autant de questions qui peuvent se poser lorsque l’on est confronté à cet évènement particulier dans la vie d’une entreprise.

1. Comment se déroule un contrôle fiscal ?

Il existe deux types de contrôle fiscal :

  • Le contrôle sur pièce :
    Ce contrôle est réalisé depuis le bureau de l’administration fiscale, qui ne visite pas le contribuable. L’administration procède à l’examen critique des déclarations des contribuables, à l’aide des renseignements et documents figurant dans les différents dossiers qu’elle détient. L’examen de comptabilité, qui vise particulièrement les entreprises astreintes à tenir et à présenter des documents comptables, permet à l’administration fiscale d’examiner la comptabilité sans se déplacer dans les locaux de l’entreprise.
  • Le contrôle sur place 
    Ce contrôle est réalisé dans les locaux du contribuable, dans le cadre de la procédure dite de « vérification de comptabilité ». Ce contrôle va au-delà du simple examen de la comptabilité (confrontation des renseignements extracomptables aux données comptables qui se trouvent à la base même des déclarations souscrites). 

Le contrôle fiscal qui vise plus particulièrement les personnes physiques est appelé « Examen contradictoire de la Situation Fiscale Personnelle » (« ESFP »). Il est mis en œuvre, le plus souvent, à la suite d’un contrôle sur pièces ou en complément d’une vérification de comptabilité pour apprécier la situation de l’exploitant ou des principaux dirigeants ou associés de l’entreprise. Il consiste à contrôler la cohérence entre, d’une part, les revenus déclarés et, d’autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal.

Avant de se présenter à l’entreprise, le vérificateur prépare son contrôle en examinant un certain nombre de documents contenus pour la plupart dans les dossiers de l’administration.

Le vérificateur peut ensuite faire des recherches extérieures, en exerçant son droit de communication (auprès de banques, du représentant en douane en matière douanière, des propres clients[1] ou fournisseurs de la société vérifiée…).

Le contribuable doit être averti, avant le début des opérations de vérification, par l’envoi ou la remise d’un avis de vérification. En principe, l’administration fiscale doit laisser un délai minimum de 2 jours francs entre l’envoi de l’avis de vérification et le début du contrôle. En pratique toutefois, l’administration fiscale avise généralement la société de sa venue au moins 15 jours à l’avance.

Plusieurs rendez-vous seront organisés, en principe dans les locaux de l’entreprise. Il est possible de demander à ce que la vérification soit effectuée dans les locaux de l’expert-comptable voir de l’administration fiscale.

La vérification s’achève en général par une réunion de synthèse entre le vérificateur, le contribuable (ou l’interlocuteur avec lequel la vérification a été conduite) et son conseil.

Au-delà de cette vérification proprement dite, l’administration fiscale est en droit de faire des contrôles inopinés. Ces contrôles ne nécessitent pas une information préalable auprès de l’entreprise.

Le contrôle inopiné est limité à certaines constatations matérielles : constat de la présence d’éléments physiques de l’exploitation et constat de l’existence et de l’état des documents comptables (ex : inventaire physique des moyens de production et/ou des éléments en stocks, présentation des documents comptables, inventaire des valeurs en caisse…)

Lorsque le contrôle est inopiné, l’administration fiscale ne peut pas commencer à analyser le contenu des documents comptables avant d’avoir émis un avis de vérification.

La vérification de comptabilité de l’entreprise peut être complétée d’une vérification de la situation fiscale personnelle de l’exploitant ou des dirigeants et principaux associés, ou d’un simple contrôle sur pièce pour corroborer les constatations faites sur place et les déclarations personnelles (avantages en nature, distribution occultes…).

L’administration fiscale peut également, en dehors de toute procédure de contrôle, réaliser auprès du contribuable une simple demande de renseignement. Bien que non contraignante, il est préférable de répondre à de telles demandes.

2. Quelles sont les suites d’un contrôle fiscal ?

Deux possibilités sont à envisager à l’issue du contrôle fiscal :  

  • Soit aucune rectification n’est envisagée à l’issue de la vérification de comptabilité. Dans ce cas, l’administration fiscale va émettre un « avis d’absence de rectification » ;
  • Soit l’administration envisage des rectifications plus ou moins importantes, dans ce cas le vérificateur va émettre une « proposition de rectification ».

Si des rectifications sont envisagées, le vérificateur à l’obligation de soumettre par écrit au contribuable les chefs de redressements et leur montant. Ce document écrit doit contenir un certain nombre d’informations (dates du contrôle, impôts concernés, années concernées, motivation des chefs de redressement…).

L’administration fiscale peut être amenée à rejeter la comptabilité, en cas de motifs précis et sérieux démontrant que la comptabilité est non probante (irrégularité graves). Dans ce cas, l’administration fiscale reconstituera elle-même le bénéfice du contribuable et en tirera des conséquences financières.

La validité des rectifications opérées par l’administration fiscale peut être remise en cause si des irrégularités ont entaché la vérification. Certaines de ces irrégularités pouvant être réparées par l’administration fiscale, il conviendra de faire intervenir un spécialiste afin d’établir une stratégie pour soulever ces irrégularités en temps voulu.  

Le contribuable qui reçoit une proposition de rectification dispose d’un délai de 30 jours pour y répondre. Dans le cadre d’une procédure de rectification dite contradictoire, le contribuable a la possibilité de demander un délai supplémentaire de 30 jours. Ce délai est de droit même en l’absence de réponse du vérificateur. Attention : dans le cadre d’une procédure de taxation d’office (ex : absence totale de dépôt d’une déclaration de chiffre d’affaires), il n’est pas possible de bénéficier de ce délai supplémentaire de 30 jours.

L’administration fiscale a l’obligation de répondre à son tour à la réponse du contribuable à sa proposition de vérification. Elle va émettre ce qu’on appelle une « réponse aux observations du contribuable », qui doit elle aussi être motivée. La réponse de l’administration fiscale peut consister en un abandon de la totalité ou partiel des chefs des redressements, ou en un maintien de la totalité des chefs de redressements.

Le contribuable peut ouvrir d’autres portes pour se défendre, la stratégie dépendant de la situation de chaque contribuable (recours hiérarchique, saisine d’une commission administrative…)

Lorsque toutes les voies de recours sont épuisées, l’administration fiscale émet un « avis d’imposition ou de mise en recouvrement ». Cet avis d’imposition ou AMR est un titre exécutoire permettant à l’administration de mettre en œuvre des mesures d’exécution forcée.  Il sera encore possible dans un délai de 2 ans à compter de la réception de cet avis d’émettre une réclamation à l’encontre de cette mise en recouvrement puis au besoin d’aller devant les  juridictions (administrative et/ou judiciaire).

Il est très important de répondre à la proposition de rectification, le fait de ne pas répondre équivalant à une acceptation tacite et à un renversement de la charge de la preuve. Il sera plus difficile pour le contribuable de se défendre par la suite dans le cadre d’une réclamation ultérieure.  

3. Comment aborder un contrôle fiscal sereinement ?

  • La préparation en amont

En prévision d’un contrôle fiscal, l’idéal est que le juridique et comptable qui concerne la structure soit à jour, et que tous les documents utiles soient bien classés et archivés.

Il convient de s’assurer que le Fichier des Ecritures Comptables (FEC) puisse être exporté rapidement et de façon complète car c’est une des premières choses que l’administration fiscale demande en cas de contrôle.

  • La position à avoir dès le début du contrôle

Il convient de s’assurer avant tout contrôle de pouvoir être en mesure de mobiliser une ou plusieurs personnes en interne afin de répondre aux demandes de l’administration fiscale. Plus les réponses données à l’administration fiscale seront complètes et rapides, plus le contrôle fiscal se passera dans de bonnes conditions.

  • Attention à l’opposition au contrôle fiscal

L’accueil du vérificateur dans de bonnes conditions va de soi. Si le contrôle fiscal ne peut pas avoir lieu à cause du comportement du contribuable, le vérificateur sera en droit de lancer une évaluation d’office (ex : refus de présenter les documents comptables, absence de réponse aux propositions de dates du vérificateur, se dérober à tout contact avec le vérificateur, bloquer l’entrée dans les locaux, outrages par menaces…) …la conséquence est une pénalité de 100% des droits rappelés…

4. Quels sont les critères déclencheurs d’un contrôle fiscal ?

  • Contrôles fiscaux permanents

Il arrive souvent qu’une entreprise qui s’est déjà fait contrôler et qui a fait l’objet de redressement dans le passé refasse l’objet d’un contrôle. Dès lors que l’administration fiscale a constaté des manquements au titre de certaines années, il y a de fortes probabilités qu’il revienne 3 ans après contrôler de nouveau la société pour voir si les règles qui n’ont pas été respectées à l’époque et qui ont été identifiées lors du précédent contrôle fiscal sont désormais respectées.

  • Survenance d’évènements particuliers

Certains évènements peuvent entrainer un contrôle (ex :  cession de titres avec déclaration d’une plus-value, rupture de comportement, restructurations…).

La taille de l’entreprise ou le secteur d’activité peuvent également être des critères déclencheurs de contrôle.  

Anomalies dans les fichiers de l’administration fiscale

L’administration fiscale se modernise est a récemment développé des outils afin de renforcer la collecte de données et leur traitement.

L’instauration du projet Pilat (Pilotage et analyse du contrôle) pris par décret n°2014-879 du 1er août 2014 et modifié par décret n°2015-1165 du 21 septembre 2015 en est un exemple.

Ce projet vise à simplifier les procédures et moderniser les outils informatiques utilisés par les vérificateurs, notamment grâce à l’emploi de logiciels d’analyse de masse de type « Big Data ».

L’administration fiscale s’est également dotée de « data analysts » qui ont pour mission de traiter et d’analyser informatiquement les bases de données.

L’administration fiscale est désormais en mesure de traiter et consolider automatiquement des masses de données afin de pouvoir créer informatiquement des listes d’exploitation contenant toutes les anomalies détectées, listes confiées aux vérificateurs.

5. Concernant les vérifications effectuées relatives aux aides d’Etat, quels sont les points d’attention ? Quels documents doit-on conserver ? Quels sont les risques encourus ?

Les aides d’Etat ont été allouées sur une base dite déclarative. Le contrôle de la DGFIP sur les demandes d’aides s’est limité aux éléments déclarés et à une attestation sur l’honneur de l’entreprise. L’administration fiscale s’est récemment mise à faire des contrôles a posteriori, afin de vérifier après allocation des aides d’Etat si celles-ci étaient vraiment de droit. Si ce n’est pas le cas, l’administration peut en demander le remboursement.  

  • Documents à conserver :

Il convient de conserver pendant 5 ans minimum tous les éléments qui permettent de justifier que l’entreprise avait bien le droit aux aides d’Etat : les éléments comptables ayant servi de base aux demandes, les échanges avec l’administration fiscale, les preuves de dépôt des demandes, le contenu des demandes, etc.

  • Points d’attention

Il faut bien évidemment avoir fait attention en amont de déclarer des informations véridiques et justifiables. Tout ce qui a été déclaré doit être réel (CA déclaré, code APE correspondant à l’activité réelle exercée…).

  • Risques encourus

Le contrôle de la DGFIP peut s’effectuer jusqu’à 5 ans à compter de la date de versement de l’aide financière.

Si l’administration fiscale se rend compte que les sommes ont été indument obtenues par le contribuable, elle peut en demander le remboursement.

Si un versement indu est identifié, le contribuable en est avisé par courrier. Le contribuable dispose alors de 15 jours pour faire connaitre ses observations. Si l’indu est confirmé, il conviendra de régler la somme déclarée dès la réception d’un titre de perception, sauf à demander un délai de paiement auprès du comptable public.  

Enfin, le contribuable bénéficiaire de l’aide s’expose à deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende en cas de fausse déclaration, sur le fondement de l’article 441-6 du Code Pénal.

6. Concernant la relation de confiance initiée par l’administration fiscale avec les contribuables, comment se manifeste-t-elle en cas de contrôle fiscal et en dehors ? Quelles en sont les limites ? Comment passer outre ?

Le droit à l’erreur repose sur un a priori de bonne foi. La charge de la preuve est inversée :  il revient à l’administration de démontrer la mauvaise foi de l’usager.

Le droit à l’erreur donne la possibilité à chaque contribuable de se tromper de bonne foi dans le remplissage de ses déclarations déposées auprès de l’administration sans risquer une sanction dès le premier manquement. Chacun doit pouvoir rectifier sa déclaration- spontanément ou au cours d’un contrôle – lorsque l’erreur est commise de bonne foi.

Comment cela se manifeste-t-il ?

Le droit à l’erreur peut se manifester de deux façons :

  • En cours de contrôle fiscal : possibilité de demander la régularisation des inexactitudes ou commissions commises de bonne foi, afin de bénéficier d’intérêts de retard réduit de 30% en déposant les déclarations rectificatives correspondantes.
  • En dehors du contrôle fiscal :
    • Régularisation spontanée avant tout contrôle : réduction de 50% des intérêts de retard ;
    • Le contribuable peut demander lui-même à être contrôlé par l’administration fiscale dans le cadre d’une procédure dite de « contrôle fiscal sur demande ».
  • Quelles en sont les limites ?

La possibilité offerte au contribuable de bénéficier d’intérêts de retard réduit de 30% en cas de dépôt d’une déclaration rectificative en cours de contrôle fiscal est soumise à un délai de 30 jours, non reconductible. Il ne faut donc pas attendre la fin du délai de réponse à la proposition de rectification, qui est au total de 60 jours en cas de demande du bénéfice du délai supplémentaire de 30 jours, avant de s’interroger sur l’opportunité du dépôt d’une déclaration rectificative.  

  • Comment passer outre ?

Au-delà du délai de 30 jours laissé au contribuable pour déposer une déclaration régularisée, il est toujours possible de demander gracieusement des remises sur les intérêts de retard ou sur les majorations. Certains de ces recours gracieux nécessitent de prouver des difficultés financières, d’autres non. L’avantage de ces recours gracieux est de pouvoir changer d’interlocuteur.

Il reste possible également de demander le bénéfice d’une transaction portant sur les majorations et intérêts de retard, ainsi qu’un échéancier de règlement. Cela peut permettre de négocier avec l’administration fiscale une diminution des pénalités. En contrepartie du bénéfice d’une transaction, le contribuable devra s’engager à ne pas aller devant les juridictions contentieuses.

Faites-vous assister par un expert-comptable durant la phase de vérification de comptabilité puis par un fiscaliste ou un avocat fiscaliste dans la poursuite de la procédure.

Conseil de nos experts

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