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Résidences de tourisme : les copropriétaires ont un pouvoir insoupçonné face aux exploitants

Date de publication : 06.11.25

droit des affaires . droit du tourisme et de l'hôtellerie . hôtellerie . tourisme

Christopher Boinet Anne Epinat

La Cour de cassation confirme les droits des syndicats de copropriétaires : dans deux arrêts rendus le même jour, elle affirme leur capacité à agir en justice pour défendre l’intérêt collectif, même lorsque la résidence de tourisme est entièrement contrôlée par un seul exploitant via des baux commerciaux.

Deux arrêts récents du même jour de la Cour de cassation (3ᵉ chambre civile, 22 mai 2025, n° 23-19.544 et 23-19.545) rappellent que les copropriétaires disposent de moyens juridiques spécifiques pour se protéger.

Il n’y a rien d’illégal à ce que le promoteur et l’exploitant unique d’une résidence de tourisme appartiennent au groupe du promoteur. Mais les copropriétaires y ont-ils toujours intérêt ?

Dans de nombreuses résidences de tourisme, le promoteur commercialise les lots, tout en gardant la gestion locative via une société affiliée [i]. Généralement, les baux soumis aux copropriétaires prévoient au profit du gestionnaire une subrogation dans leurs droits et actions contre les constructeurs pour la mise en jeu des garanties légales de construction.

En cas de désordres peu importants, le gestionnaire pourra hésiter/tarder à engager une action contre sa société mère ou le groupe de sociétés auquel il appartient.

Résultat : Certains désordres à la livraison ou à l’exploitation de la résidence (inachèvement, dégât des eaux, non-conformité aux normes, etc.) peuvent s’accumuler face à l’inertie de l’exploitant.

Les copropriétaires sont-ils alors privés de tous moyens d’action ?

La justice vient de trancher en faveur des copropriétaires qui souhaitaient obtenir la réparation des dommages affectant les parties communes des immeubles, ainsi que les parties privatives de plusieurs lots. La cour d’appel avait rejeté leur demande d’expertise en retenant que les copropriétaires n’avaient plus qualité à agir en raison des clauses de subrogation insérées dans les baux au profit du gestionnaire unique de la résidence.

La Cour de cassation a censuré deux fois les arrêts d’appel et a affirmé que :

– le syndicat des copropriétaires a qualité pour agir[ii] et pour demander réparation pour les dommages affectant les parties communes, sans être bloqué par l’exploitant.

– les copropriétaires conservent leur droit d’agir en justice par l’intermédiaire du syndicat des copropriétaires, malgré la subrogation consentie au gestionnaire dans les baux. Les propriétaires ne peuvent en effet transférer au gestionnaire les droits détenus par le syndicat.

– en conséquence peu importe la présence d’un exploitant unique dévolu à chaque résidence de tourisme classée [iii], et les subrogations dont il dispose.

Que peut faire en pratique le collectif des copropriétaires pour préserver son patrimoine sans aller jusqu’au contentieux ?

1. Identifier les liens capitalistiques et contractuels entre promoteur et exploitant (et parfois syndic) ;

2. Impliquer le syndicat des copropriétaires pour lancer une expertise ou une action en justice si elle s’avère nécessaire et urgente ;

3. Demander plus de transparence au gestionnaire au sujet des travaux à réaliser (budget, délais, impact sur le patrimoine et l’opérationnel de la résidence de tourisme).




Sources

[i] parfois le promoteur impose également un « syndic maison » cad un syndic affilié également au groupe du promoteur

[ii] article 15 de la loi de 1965

[iii] article D 321-1 du code du tourisme

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